Union des Athées - Avis autorisés

Des catholiques intégristes attaquent Charlie Hebdo
vendredi 5 décembre 2008

L’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a reçu jeudi 4 décembre une citation directe pour « provocation à la discrimination religieuse » à la requête de l’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne, plus connue sous le nom d’Agrif. Dirigée par un ancien cadre du Front national, Bernard Antony, l’association n’a pas digéré deux extraits du numéro « Spécial Pape » publié par Charlie Hebdo le 10 septembre.

Dans sa citation, rédigée dans un français un tantinet désuet, l’avocat de l’Agrif détaille les raisons de ces poursuites : « Qu’au demeurant la demanderesse qui, pour se garder de contentieux répétitifs, redondants et vains, fait profession d’ignorer la plupart des provocations antichrétiennes qui constituent pourtant, en terme d’oxymore, une “actualité permanente », eût négligé cette publication, n’étaient en page 4 deux petits libelles respectivement intitulés “Fondamentaux » et “Devinette », qui apparaissent éminemment toxiques, et imprévisibles les épiphénomènes dont ils sont potentiellement porteurs. »

En fait de « contentieux répétitifs », l’Agrif n’avait pas poursuivi Charlie Hebdo depuis une dizaine d’années, après avoir perdu cinq des six procès qu’elle lui avait intentés.

Ce qui est « toxique » selon l’association, c’est d’avoir écrit « que l’on redonne les chrétiens à bouffer aux lions », dans un passage évoquant le retour de Benoît XVI « aux fondamentaux du catholicisme ». L’Agrif y voit rien moins qu’un appel au meurtre : « Dans sa forme injonctive, cette assertion métaphorique [...] peut pour certains esprits représenter une manière d’appel à la violence, voire au meurtre. Faut-il rappeler qu’en 1981 le Pape Jean-Paul II a lui-même été victime d’un attentat gravissime ? »

L’autre passage visé par la citation est celui qui, selon l’Agrif, assimile la Bible à du porno : « Le second feint d’assimiler l’évangile selon saint Marc à un ouvrage pornographique -ce caractère étant supposé se déduire de la phrase “On lui amena des petits enfants pour qu’il les touche » ; la phrase suivante exposant : “C’est juste après que ce gros cochon de Jésus Christ s’exclama laissez venir à moi les petits enfants » ; alors que les atteintes à l’intégrité des enfants constituent sans doute, dans une époque qui doute de ses valeurs, la dernière figure du mal absolu. »

L’Agrif, horresco referens -expression latine employée dans la citation et signifiant « je frémis d’horreur en le racontant »-, estime donc que Charlie Hebdo présente « les chrétiens comme les thuriféraires d’un pervers aux moeurs dénaturées, criminelles en l’espèce, qu’il conviendrait d’éliminer ». Elle réclame à l’hebdomadaire 15000 euros de dommages et intérêts et 5000 euros de frais de justice.

L’affaire sera plaidée le 27 janvier à 13 h 30 devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris.

L’avocat de Charlie, Richard Malka, se demande si cette affaire marque « un retour de la susceptibilité religieuse. Le climat est peut-être propice à cela ?

Par Augustin Scalbert, pour Rue89.com